Le Rite Écossais Rectifié (R⸫É⸫R⸫) est un rite maçonnique et un régime englobant une Maçonnerie en quatre grades et un Ordre Intérieur de Chevalerie Spirituelle.
Il présente des spécificités fortes. En particulier, il est d’une cohérence remarquable du grade d’apprenti à l’état de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte (C⸫B⸫C⸫S⸫).
Jean Baptiste Willermoz, qui vécu 94 ans (1730 – 1824), a consacré sa vie à créer et développer le R⸫É⸫R⸫ avant que celui-ci ne tombe dans l’oubli pendant le XIXe siècle.
Il nous a laissé de nombreux manuscrits, plus de 2.000 lettres, des rituels et des explications extrêmement précises de ceux-ci. Sa constance dans la constitution de ce Rite explique la cohérence de son enseignement.

Le Rite Écossais Rectifié est issu de la réunion de trois composantes :

  • Le rite des modernes tel qu’il était pratiqué au XVIIIe siècle en France et nommé de nos jours Rite Français Traditionnel.
  • La structure chevaleresque, mais également des éléments de rituel maçonnique, particulièrement au quatrième grade, issus de la Stricte Observance.
  • La doctrine martinésiste de Martinès de Pasqually expurgée de son aspect théurgique par Louis Claude de Saint Martin pour ne retenir que la doctrine théosophique du Traité de la Réintégration.

Le rite est né de deux convents. Celui dit des Gaules à Lyon en 1778 et celui de Wilhelmsbad en 1782 au cours duquel fut abandonné la filiation directe de l’Ordre du Temple pour n’en retenir que son héritage spirituel.

Les spécificités évoquées plus haut sont multiples :

  1. Le Rite est chrétien, mais d’un christianisme dépourvu de tout dogme, certains le qualifient de christianisme primitif. Ce dernier vocable signifie qu’il est fait référence au Christ, guide suprême, très présent dans le rite. En effet, cette référence est antérieure à la création de toutes églises en tant qu’institutions ainsi qu’aux dogmes qui les accompagnent. Jean Baptiste Willermoz a parfaitement dissocié la religion de la Franc-maçonnerie en déclarant : « Du moment qu’on mêlera la religion à la maçonnerie dans l’Ordre symbolique on opérera sa ruine… [1]. »
  2. Il est constitué de quatre grades maçonniques et ne compte pas de hauts grades. Ces quatre grades : apprenti, compagnon, maître et maître écossais de Saint André (M⸫E⸫S⸫A⸫) constituent un cursus maçonnique complet qui prépare le maçon à éventuellement devenir un chevalier s’il présente les qualités requises.
  3. Il a été créé en régime, constituant un Ordre de deux classes ostensibles : la maçonnique et la chevaleresque. Cette notion d’Ordre est omniprésente dans l’esprit du rite. Dès sa réception, le nouvel apprenti entre dans l’Ordre. Cette notion implique une hiérarchie librement consentie.
  4. Il renferme une doctrine issue de l’Ordre des Chevaliers Maçons Élus Coëns de l’Univers créé par Martinès de Pasqually dont Jean Baptiste Willermoz et Louis Claude de Saint Martin furent des « Émules ». Il n’est pas inutile de rappeler que doctrine n’est pas dogme. La doctrine désigne un corpus constitué d’idées et de notions articulées avec cohérence pour tenter de répondre à des questions essentielles. Celle du Rite Écossais Rectifié s’inspire du Traité de la Réintégration dont sont exclus l’aspect et les pratiques théurgiques. Cette doctrine est résumée dans le tableau du premier grade : une colonne tronquée par le haut mais ferme sur sa base avec l’inscription « Adhuc Stat ! » (elle tient encore debout !). Celui-ci figure la chute de l’homme. Cependant, comme le précise le rituel du premier grade : « un faible rayon de lumière est inné dans l’homme », ce qui permettra à ce dernier de retrouver son état primitif de gloire. Nous avons là tout le programme du R⸫É⸫R⸫ qui, par l’Initiation, lui procure les moyens de remplir sa mission : la Réconciliation individuelle afin de permettre la Réintégration de l’ensemble de l’humanité.

  5. Enfin, sa pratique présente également des spécificités. Issu de la Maçonnerie des Modernes, telle que pratiquée en France au XVIIIe siècle, les maçons rectifiés porte une épée à tous les grades et le maître est couvert d’un chapeau en loge dès le premier grade, contrairement aux compagnons et aux apprentis.

La structure du Régime en deux classes ostensibles comprend les grades ou états suivants :

  • La classe symbolique constituée de la loge bleue avec les trois grades communs à toute la Franc-maçonnerie, apprenti, compagnon et maître. Cette loge est complétée par la loge verte de maître écossais de Saint André, grade symbolique terminal de la maçonnerie rectifiée et préparation à quelque chose de supérieur.
  • La classe chevaleresque se divise en deux états. L’Écuyer Novice, niveau de transition probatoire où il est demandé à ce futur chevalier de préparer ses armes : à savoir son nom, sa devise, son blason et éventuellement son cri.

Enfin, il existait une classe non ostensible de Profès et Grand Profès constituée de Collèges Métropolitains dont la dernière filiation reconnue se trouve en Suisse.

René Guilly, fondateur de la Loge Nationale Française, le résume ainsi dans une conférence qu’il donna en 1979 sous le titre Signification du Régime Écossais Rectifié en ce temps :

« Le R⸫E⸫R⸫ est un système à clés ; au dessus des trois grades bleus, il y a le grade de Maître Ecossais de Saint André qui, incontestablement joue le rôle d’une clé pour les trois premiers grades et il y avait, j’emploie l’imparfait, il y avait au dessus de l’Ordre Intérieur, deux autres niveaux qui étaient aussi des niveaux à clé et qui apportaient des enseignements ésotériques et traditionnels qui donnent l’explication profonde du R⸫E⸫R⸫. [2] »

BIBLIOGRAPHIE

  • Code maçonnique des loges réunies et rectifiées de France. Tel qu’il a été approuvé par les députés des Directoires de France, au convent national de Lyon, en 5778 in http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33304527p, 5779.
  • Règle maçonnique, à l’usage des loges réunies et rectifiées, arrêtée au convent général de Wilhelmsbad [16 juil. 1782], Imprimerie J. Carey, Genève, 1890.
  • Pierre NOËL, De la Stricte Observance au Rite Écossais Rectifié, ACTA MACIONICA N°5, Grande Loge Régulière de Belgique, in 1995.
  • Patrick MENEGHETTI, Doctrine du Rite Écossais rectifié, sources et influences, in Travaux

[1Lettre de Willermoz à Bernard de Türckheim (1752-1831, 3 février 1783, in Renaissance Traditionnelle n°35, juillet 1978, p. 179.

[2René GUILLY, a Latomia Universa. Conférence du 21.07.1979.

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